le parcours d'Henryk Mrozek, l'homme qui a fermé l'UP6
par PAILLART André le, 10/10/2007Dabord galibot à la fosse 4, il est devenu le chef d'exploitation du grand siège de concentration des mines de Bruay.
Henryk Mrozek, l'homme qui a fermé l'UP 6 d'Haillicourt.
Pas courant le parcours d'Henryk Mrozek, arrivé de Pologne en 1930. Le jour de ses 14 ans, il s'inscrit à la fosse 4.
A force de volonté et de travail, il devient successivement maçon, electromécanicien, responsable du service électromécanique pour le groupe Auchel Bruay et, enfin, ingénieur. Jugé mûr pour diriger une mine, et quelle mine!, il devient le chef d'exploitation de l'unité de production N°6. Une aventure qui durera jusqu'au 7 septembre 1979, et même aprés. Au delà de son départ en retraite officiel, le 11 novembre 1981.
La date fatidique du 7 septembre 1979 est inscrite sur le socle d'une des dernières gaillettes remontées de la taille 163, veine 16, à 1000 m de profondeur. A part çà, cette journée a ressemblé aux autres pour le patron du 6. Son cahier de notes personnelles ne mentionne même pas ces gaillettes. Pour lui, la fermeture de la fosse " suivait un processus normal ". Inéluctable.
Tout ce qui a conduit à cette fin et ce qui la suivie est, par contre, scrupuleusement consigné, des opérations de démantèlement en passant par les essais de gazéification et la destruction des archives de l'unité de production.
Eh oui, quasiment tout ce qui a fait la vie quotidienne de la fosse est parti en fumée. " La chaufferie a fonctionné pendant quinze jours, brûlant les fiches de salaire, celles des brimades (les amendes tant redoutées des mineurs)...", raconte Mr Mrozek.
Le 12 octobre 1979 commencent les sondages pour une expérience de gazéification du charbon. Il s'agit ,en gros, de mettre le feu à une veine profonde et ainsi provoquer un dégagement gazeux à l'opposé. Les résistances sont allumées le 20 juin 1980. Aprés quelques échappées d'effluves (et beaucoup de problèmes), l'expérience est stoppée au bout de deux ans.
Durant ce temps, Henyk Mrozek s'hébergeait dans sa caravane personnelle, installée sur le carreau:" la présence physique du responsable était indispensable ", indique l'ex chef d'exploitation, qui n'avait jamais vraiment cru en cette expérience, classée " top secret ".
" Cà ressemblerait à un cultivateur qui planterait des patates, qui ramasserait les fanes et laisserait les patates en terre ", avait-il dit aux responsables de CDF et de GdF.
Résultat: " On n'a pas de quoi nous faire cuire des oeufs!..." Celà étant ces essais ont au moins eu le mérite de maintenir à leur poste une cinquantaine d'ouvriers durant deux ans.
Entre temps, le remblayage des puits, commencés en février 1980, s'était poursuivi. Chaque entée de galerie, précise-t'il, a été fermée avec des murs de deux mètres d'épaisseur, ou des berlines remplies de charbon, et celà de l'étage -1165 jusqu'au niveau 0.
Les cages, elles, étaient laissées tout au fond, leurs cables coupés, avant que les puits soient totalement remblayés par des schistes, qui retournaient d'où ils étaient venus. Tout le matériel qui pouvait être récupéré était revendu, au prix de la ferraille.
Il en fût ainsi des locomotives du parc de Bagatelle et des rails sur lesquels elles font encore voyager les enfants et les parents.
Le cahier d'Henryk Mrozek s'arrête à la date du 1er janvier 1982. Ce jour là, il a noté: " A quoi vais-je servir maintenant? "
La petite histoire dit déjà qu'il est utile à beaucoup. A ses amis de Sonara par exemple.
Sources: La Voix du Nord 20 août 2000.