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RACONTE-MOI MA FAMILLE N°9 Leur guerre à eux…
par Paul-Frantz le, 08/08/2021  

“Raconte-moi ma famille...” N° 09 - Récits de famille, racontés par nos anciens.
Par Paul-Frantz VIDAL (famille maternelle à Fouquières-lès-Lens)
"LEUR GUERRE A EUX…"


Après avoir divisé et meurtri les familles, la guerre a fini par rassembler ceux qui restaient. On se retrouvait pour parler de ceux qui ne sont pas rentré, pour aider ceux qui souffrent encore, et peut-être simplement pour ne plus avoir peur. Quand notre mémé Marguerite nous parlait de la guerre, elle nommait tous ceux qui avaient été les acteurs involontaires de cette tragédie humaine.
Ce qui m'a souvent frappé, c'est la variété et la rareté des prénoms des parents et amis qu'elle faisait revivre dans ses récits. Déjà l'arbre généalogique familial atteignait des sommets d'originalité. Dans la parenté de notre grand-père, noblement prénommé Dartagnan, il y a, je le rappelle : Godelieve, Anasiata, Lucrèce, Blida, Paula, mais, il en est de même dans celle de Marguerite, ou l'on trouve : Olympe, Rigault, Kléber, Jeanny, sans oublier le célèbre Bonchrétien. Parmi les amis, voisins et autres connaissances on trouve aussi, Pharamon, Léa, et Faon.

"Faon" était un surnom, mais il resta célèbre dans la famille. De son vrai nom Pierre Joseph BOQUILLON il était le beau-frère de Dartagnan, époux d'Anasiata. Marguerite parlait souvent des repas du dimanche que Faon et Dartagnan aimaient prendre en famille. Faon BOQUILLON est de la classe 1895 né à Liévin, et plus âgé que Dartagnan. Tous deux mineurs, ils furent combattants de la grande guerre, du début jusqu'à la fin.
Autant Dartagnan était puissant et râblé, autant Faon était fluet et fragile. Ils n'ont pas combattu dans les mêmes unités, ni aux mêmes endroits, mais ils avaient au cœur le même amour de leur patrie, le même sens du devoir et la même volonté de victoire. Ils aimaient se retrouver pour se raconter les événements vécus au front. Seuls ceux qui ont vécu de semblables instants peuvent comprendre toute la souffrance, l'horreur et l'angoisse ressentie dans les tranchées et pendant les assauts.
Longtemps après le conflit, ils revivaient l'un pour l'autre les grands moments de "leur guerre". Bien sûr chacun considérait son action comme ayant été la plus déterminante dans l'issue du conflit. Pour Dartagnan, Faon n'était qu'un simple soldat qui s'est contenté d'obéir et de se battre. Mais pour Faon, ce fut son combat a lui le plus dur, le plus âpre. Dartagnan n'a jamais reproché à Faon sa condamnation à 4 jours de prison et 16 francs d'amende pour coups et blessure.

Dans son récit, c'était toujours le même événement qui revenait après quelques verres de "bistouille", cette eau de vie de genièvre qui accompagnait immanquablement les repas au moment du café. Il n'en fallait pas beaucoup au chétif Faon pour retrouver toute son ardeur guerrière, et monter à l'assaut, baïonnette au canon.
Comme disait notre Grand-Mère, la bonne mémé Marguerite :
- "Y r'preneau Tahure…!"
(Il reprenait Tahure… !)

J'ai mis des années avant de savoir que le Ravin des Mures, à Tahure, au nom bucolique et enchanteur, avait été une des boucheries les plus sanglantes de la guerre, orchestrée par l'entêtement et la vanité stupide des généraux Joffre et Pétain. J'imagine le récit de Faon, en patois bien sûr :
"Depuis l'automne 1914, jusqu'à ce mois de septembre 1915, une guerre de position s'était peu à peu installée sur un front qui barrait la France des Flandres aux Vosges. Nos brillants stratèges soutenaient l'idée que la rupture du front ne serait possible que grâce à des attaques puissantes dans différentes régions, et sur un très large front. Nous étions devant la butte de Tahure, en Champagne. C'est un petit promontoire d'une centaine de mètres qui domine une plaine étonnement plate. Depuis plusieurs mois, les tentatives françaises de déloger les positions allemandes de ce plateau s'étaient soldées par de cuisants échecs, et nombre de soldats des deux camps y avaient déjà perdu la vie.

Mais cette fois-ci, on nous l'a promis, ce serait différent. Dans tout le dispositif, nos brillants généraux avaient engagé près de 500.000 hommes pour cette seconde bataille de Champagne.
Au soir du 24 septembre il pleut, nous sommes trempés et transis, et nous allons passer la nuit dans l'attente de l'ordre d'assaut. Au matin du 25, le message du glorieux général JOFFRE nous disait enfin pourquoi nous allions nous battre. Il nous a demandé :
"…d’y aller à plein cœur, pour la délivrance de la Patrie et pour le triomphe du Droit et de la Liberté…. Votre élan sera irrésistible, il vous portera d’un premier effort jusqu’aux batteries de l’adversaire, au-delà des lignes fortifiées qu’il vous oppose. Vous ne lui laisserez ni trêve, ni repos, jusqu’à l’achèvement de la victoire."

A n'en pas douter, cette bataille allait sceller le sort de la guerre ! A 9h15, Faon Boquillon et cent vingt mille de ses camarades, ont bondi de la tranchée, hurlant baïonnette au canon, en direction des lignes allemandes, et de la colline de Tahure.
Le combat a duré quatre jours, sous un déluge de feu et de fer. Ce ne sont que des ruines et des cratères de bombes que nous avons occupés enfin, du moins pour ceux qui restaient. L'attaque s'acheva dix jours plus tard, près de 140.000 français, et autant d'allemands périrent dans cette formidable avancée de seulement quatre kilomètres, aussitôt abandonnés en octobre 1915."

Ainsi, en quelques jours, près de 300.000 hommes périrent, et autant furent blessés et estropiés à vie, pour le seul plaisir d'avoir repris une colline qu'on a abandonnée aussitôt, car y être ne servait à rien… !
C'est sûrement la barbarie acharnée de cette lutte dérisoire et vaine qui mettait hors de lui Faon Boquillon, quand il "reprenait Tahure".

Bravo au vaillant soldat JOFFRE, catalan de Rivesaltes, pour avoir conclu avec autant de morgue et de stupidité :
"…Aucun des sacrifices consentis n’a été vain. Tous ont su concourir à la tâche commune. Le présent est un sûr garant de l’avenir. Le Commandant en chef est fier de commander aux plus belles troupes que la France n'ait jamais connues."
Phrases creuses qui ne veulent rien dire. En matière de langue de bois il n'y a pas mieux…!

Le Général JOFFRE était un fervent adepte de "la guerre à outrance" qu'il fit enseigner à l'École de Guerre. Il recommandait des assauts de masse avec des nombres importants de combattant. Ainsi même si les pertes étaient considérables, ceux qui resteraient à la fin seraient encore plus nombreux que ceux qui subissaient l'assaut. Technique de la victoire assurée !
Sa méthode fit de lui l'un des plus grands criminels de guerre, doublé du stratège le plus stupide qu'une armée puisse connaitre. Quand on parle de mettre à bas des statues, on devrait commencer par celles de JOFFRE, qui fut de plus un Académicien Français (Surement pour avoir découvert que "le présent est un sûr garant de l'avenir").

Ce qui est caractéristique, lors du récit de Faon, c'est qu'il mimait à la perfection les phases de l'assaut. Un jour, illustrant comme à l'accoutumée la sortie de tranchée en hurlant baïonnette au canon (Il tenait une fourchette à bout de bras…), il sauta sur la table. Dartagnan, face à lui, s'imagine bientôt pourfendu par la fourchette du fantassin vengeur. N'écoutant que son courage, et décidé à dévier l'attaque de front, il attrape Faon par les épaules et le déporte sur le côté où il plonge littéralement, finissant sa course sous la cuisinière en fonte qui fonctionnait. Sa tête et ses épaules s'engagent sous le pesant fourneau. Il ne bouge plus, impossible de le sortir en le tirant par les pieds.

Panique de tous, Pépé, sa sœur et Mémé se précipitent. Il faut le dégager avant qu'il ne subisse des graves brûlures. Pépé, saisit à deux mains le bas de la cuisinière, il s'arc-boute pour la lever et, dans un effort extrême, il lève la tonne de fonte, le conduit et le charbon qui brûlait. En un éclair les femmes retirent Faon de sa fâcheuse posture et l'assoie sur une chaise. Il reprend à peine connaissance. On lui refuse bien sûr le petit verre supplémentaire qu'il réclame aussitôt pour retrouver ses esprits, mais, heureusement il ne semble pas être blessé.

Bien longtemps après l'événement, on racontait encore cet épisode inédit de la prise de Tahure, épisode qui aurait sûrement plût au Général Joffre, pour sa bêtise et son inutilité. Bien souvent, Faon, qui était resté inconscient durant son court séjour sous la cuisinière, affirmait qu'il aurait très bien pu s'en sortir tout seul. Refusant d'admettre que l'intervention de Dartagnan avait été salvatrice. Il prétendait avoir été en mesure de soulever la cuisinière de la seule force de ses épaules. Et, comme pour justifier sa capacité à y parvenir, il ajoutait en bombant le torse et gonflant ses pectoraux maigrelets :
" Té pinse, avec eune carrure ainsi… !"
(Tu penses, avec une telle carrure… !)

Quelques années encore ils se sont chamaillés. Dartagnan faisait peur à Faon avec sa force et sa puissance. Il le menaçait souvent quand ils n'étaient pas d'accord. Au point que Faon finissait par y croire, et n'était plus très rassuré lors des visites de Dartagnan. Un jour, il finit par confier à sa femme qu'il cachait une hache pour l'avoir sous la main si Dartagnan venait à le menacer encore. Effrayée à l'idée qu'un drame puisse se produire, elle s'en est ouverte à sa belle sœur Marguerite qui, bien sûr le répéta à Dartagnan. Vous imaginez aisément la suite…
Dartagnan à bondit dehors, s'est précipité chez Faon en l'appelant d'une voix forte. En apercevant son compère Dartagnan, l'apostrophe :
"Duqu'elle est t'n'hache… ? Hin, moute vir eu t'n'hache, si té cro qu'té va m'fair peur…!"
(Où elle est ta hache… ? Hein, montre voir ta hache, si tu crois que tu vas me faire peur…)

Usés par la mine, rongé par la silicose et l'ypérite, diminués par leurs blessures, ces deux hommes de grande valeur n'ont pas vécu très vieux, et ils nous ont privé très tôt de leur truculence et de leur passion.
Vidal Jean-Louis Dominique (Classe 1905)
Il n'a jamais parlé de "sa" guerre… Jamais notre Grand-Père paternel n'a prononcé un seul mot sur ce qu'il a vécu. Pas même ses enfants n'ont mentionné cette période qu'il passa loin de sa famille. Et pourtant, il s'est comporté en héro lui aussi. La seule photo de lui en soldat atteste de sa bravoure, car il porte fièrement cette Croix de Guerre durement gagnée.

Il était Garde Champêtre à Camparan, et il fut incorporé au sein du 144e Régiment d'Infanterie et nommé caporal en 1915. Sa citation à l'Ordre de la Croix de Guerre dit tout sur son comportement lors des différentes campagnes qu'il a faites du 4 mai 1914 au 2 décembre 1918, pendant plus de quatre années :
"Au front depuis le début de la campagne, Très bon gradé. En des circonstances pénibles et périlleuses, notamment en Artois, à Verdun, dans la Somme et en Champagne, a toujours fait preuve d'une endurance, d'un dévouement et d'un courage remarquables".
Il fut blessé le 4 juin 1918 et décoré de la croix de guerre avec palme. Bien qu'ayant longtemps souffert de ses blessures il ne s'est jamais plaint et, lorsque très diminué, en 1935, il entreprit de réclamer une pension, il lui fut répondu que les délais impartis étaient dépassés.

Comme Dartagnan, il avait été de toutes les batailles meurtrières, Verdun, la Somme, le chemin des Dames… Je lui en veux un peu de tant de modestie car il aurait pu, lui aussi, nous apporter son témoignage.

A bientôt… ! Pour d'autres récits !


 


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